La plus ancienne des religions du Livre a codifié depuis longtemps les obsèques qu’il convient de réserver à un défunt. Rôle des proches et du rabbin officiant, toilette mortuaire, prières, deuil: la religion juive a établi un certain nombre de traditions et de règles pour offrir à la personne disparue les funérailles les plus respectueuses et conformes à sa foi. Il s’agit également, au-delà de la famille immédiate, pour la communauté juive d’honorer l’un de ses membres et de souligner le lien sacré qui l’unit au peuple juif et à la terre d’Israël. L’enterrement juif est tout entier marqué par un esprit d’humilité, de recueillement et de simplicité. Il doit avoir lieu 3 jours après le décès, à l’exception du jour de shabbat (ou sabbat), le samedi. Les obsèques juives peuvent avoir lieu en France comme être l’occasion d’un rapatriement en Israël. Voici un tour d’horizon des étapes de ce moment important.
Les traditions à respecter avant l’enterrement
Les traditions liées aux rites funéraires judaïques commencent avant même la dernière expiration. Dans les derniers instants d’un mourant il est absolument essentiel de ne pas toucher son corps afin de ne pas entraver son âme. Tout contact physique est à proscrire. Il est recommandé aux proches de prier en attendant que l’âme se libère du corps qui s’éteint mais de ne surtout pas toucher le corps.
A partir du décès s’ouvre une nouvelle étape. Le verset Chema Israël, tiré du Deutéronome, est cité : “Shemaʿ Yisrā’ēl YHWH elohénou YHWH eḥāḏ” (« écoute Israël, l’Éternel notre Dieu, l’Éternel un »). Une bougie particulière est allumée près du visage du défunt: cette veilleuse a vocation à rester allumée jusqu’au 7ème jour qui suit l’enterrement. Autant que possible, les miroirs de la maison devront être couverts de tissus, toujours dans le même esprit d’humilité.
Les proches endeuillés sont appelés “onèn”. Ils doivent respecter certaines obligations religieuses spéciales. Ils ont l’interdiction de consommer de la viande et du vin par exemple. La prière qu’ils doivent réciter est le Kaddich (ou Kaddish).
Le défunt est veillé nuit et jour au son du Livre des Psaumes. Sa position est sa tenue sont importantes. En général un proche, le fils aîné, le place dans une posture digne, lui ferme les yeux et aligne ses pieds en direction de la porte. Le corps du défunt est couvert pendant toute la veillée d’un linceul sobre et clair pour préserver le souvenir intact de lui vivant auprès de ses proches.
Avant l’enterrement juif doit aussi avoir lieu la toilette mortuaire. Elle est réalisée par des croyants particulièrement pieux de la Hevra Kaddicha, selon des règles strictes. Le judaïsme proscrit toute atteinte au corps du défunt. Une métaphore est souvent utilisée pour illustrer cette situation: un rouleau de la Torah endommagé auquel on doit néanmoins un respect absolu. Dès lors, il est interdit de pratiquer la crémation, à l’inverse par exemple des bouddhistes et des protestants, de même que les soins de conservation (la thanatopraxie) sont considérés comme dégradants. Le don d’organes, décidé par le défunt lui-même avant son décès, est autorisé en tant que bonne action permettant de préserver la vie.
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Les étapes de la cérémonie et du deuil
En France, il n’est pas permis de réaliser une inhumation en pleine terre comme le veut la tradition hébraïque. Lorsque la toilette mortuaire a été effectuée, le corps du défunt est donc placé dans un cercueil modeste en bois simple avec quelques poignées de la terre d’Israël. Le défunt est habillé d’un voile lui aussi le plus simple possible. A ce stade, les proches de la personne décédée ne reverront plus son visage.
L’enterrement peut avoir lieu dans un cimetière juif ou dans un carré confessionnel. La cérémonie religieuse s’y déroule et non à la synagogue. C’est une cérémonie sans faste. Les hommes sont vêtus de leur kippa et tout se déroule sous la supervision du rabbin.
Lorsque le cercueil est descendu en terre, on procède à la lecture du « Tsidouk Hadin », une prière pour les morts. Trois pelletées de terre viendront le recouvrir.
Les personnes présentes privilégient la retenue et la sobriété: des tenues vestimentaires austères, dépourvues de bijoux. Les fleurs ne sont pas appropriées, il convient davantage de déposer une petite pierre sur la tombe à l’issue de la cérémonie, et de faire un don à la synagogue ou à un fonds de solidarité. Les non-juifs peuvent participer à la cérémonie.
La tradition veut que les membres de la famille déchire une pièce de tissu près de leur coeur lors de l’enterrement de l’être cher : c’est le rite de la “K’ria”. A la fin de la cérémonie, les endeuillés se lavent les mains mais ne doivent pas les sécher pour marquer le caractère durable de leur souvenir. Un repas peut rassembler la famille autour mets ronds et pleins symbolisant la vie comme des lentilles ou des oeufs.
La période de deuil s’étend sur sept puis trente jours, puis une année. Les sept jours (shiva) qui suivent l’enterrement s’achèvent par une veillée lors de laquelle le minyan rassemblant 10 adultes juifs récitent le Kaddich. Pendant un mois (sheloshim) les “onèn” ne sont plus soumis aux interdits stricts mais il ne faut pas se raser, se couper les cheveux ou porter de vêtements neufs. Pendant cette période, le Kaddich est toujours quotidien, il sera récité de façon plus espacé l’année qui suit (shana). Enfin, après un an, le Jahrzeit vient commémorer le souvenir du disparu.
Organiser un rapatriement en Israël
Les juifs de France ont un lien spirituel très puissant avec Israël, de telle manière que certains, ou leurs proches, souhaitent faire rapatrier leur corps en Terre sainte après leur mort. Ce transport de corps, pratiqué depuis de nombreuses années, est possible sous certaines conditions. Le principal enjeu est de respecter les dernières volontés du défunt en lui donnant la sépulture dans le pays qu’il a choisi comme dernière demeure.
Il convient d’abord de respecter toutes les conditions administratives. Les proches ou les professionnels sollicités devront remplir une demande de rapatriement. Il leur faudra également fournir un certificat de décès, et surtout obtenir l’autorisation de fermeture du cercueil de la part du préfet du lieu où le décès s’est produit. Une fois ces démarches réalisées, le rapatriement peut commencer.
Néanmoins pour les défunts de confession juive, comme pour les musulmans, une difficulté particulière existe. L’enterrement doit avoir lieu dans les plus brefs délais, et il est parfois difficile, dans ce moment douloureux, de réaliser toutes ces démarches aussi rapidement. Ensuite, la loi exige à partir de 48h, et pour tout déplacement de corps, des soins de thanatopraxie, c’est à dire de conservation. Or, comme indiqué ci-dessus, la religion juive proscrit toute atteinte au corps du défunt comme cet embaumement. Une tolérance est cependant prévue dans ce cas précis des rapatriements vers Israël, ou les pays du Maghreb pour les musulmans.
Le rapatriement du corps du défunt peut occasionner des frais d’obsèques importants. Certains sont connus : transport aérien pour le défunt et les proches, prise en charge israélienne vers le lieu de l’enterrement, débours divers liés à la cérémonie rituelle, monument funéraire…Certains sont moins connus mais importants également: il convient de savoir notamment que, si la concession est gratuite pour les citoyens israéliens, elle peut être onéreuse et difficile à obtenir pour les personnes ne disposant pas officiellement de la nationalité de ce pays. Il est cependant possible d’avoir recours à des cimetières privés pour se faire enterrer. A noter qu’en Israël, le défunt pourra évidemment être enterré à même la terre conformément à la tradition israélite.
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